Du début à la fin : ce programme de concert porte un regard sur le début et la fin de l'univers musical de Chopin.
Dans la première moitié, des œuvres de jeunesse sont présentées - commentées par Robert Schumann. Il s'agit des quatre premières mazurkas, des trois premiers nocturnes ainsi que de la première ballade de la plume du jeune Chopin. Le plus petit se trouve au début : la musique se déplace dans un espace très restreint lorsque, dans les mazurkas, on chante, on danse, on rêve et on s'exalte. Ces danses passent et pourtant, à la manière d'une loupe, elles concentrent des facettes multicolores du caractère de Chopin.
Suit un salut de Robert Schumann, lui aussi encore jeune. Son arabesque porte déjà dans son titre le motif de l'ornementation et de la décoration et donne ainsi le mot d'ordre pour un moment authentique des nocturnes de Chopin. Ici, redire une fois de plus devient un événement, car Chopin connaît pour chaque mélodie des nuances inépuisables qu'il peut en tirer.
A la fin de la première moitié, une œuvre qui réunit toutes les découvertes faites jusqu'ici : La première ballade de Chopin op. 23 en sol mineur. Ici, tout s'enchaîne, le décor change de minute en minute, cette musique n'a pas son pareil en termes de densité. Chopin observe comment ses mélodies gagnent sans cesse en expressivité au point d'exploser et de laisser place à la nouveauté.
Au début de la deuxième moitié, l'horizon s'élargit. Le regard vers Jean-Sébastien Bach est un regard vers les racines, car Chopin a respiré le Clavier bien tempéré toute sa vie et a laissé sa musique s'en imprégner. Il règne dans ce prélude en si mineur avec fugue une atmosphère de fin du monde, la douleur comme sujet entre en scène...
... et reste présente comme protagoniste dans la dernière grande sonate de Chopin dans la même tonalité. Dans cette œuvre tardive de Chopin, la rencontre du chromatisme et de la diatonie s'effectue en dialogue avec la fugue de Bach - il y a la pierre rugueuse et la musique qui ne tient qu'à un fil. Le deuxième mouvement est frais comme la rosée, le troisième commence de manière baroque et dramatique et déploie ensuite la plus belle cantilène du monde. La musique entre dans un doux vertige avant d'être propulsée par la passion dans le finale. Ce n'est que dans les derniers mètres que le soleil brille définitivement à travers les nuages.